Voici la suite et fin de compte-rendu de la WebGameConférence. Cf. la première partie qui décrivait les tables rondes de la matinée. Nous attaquons maintenant l'après-midi.

  • Du virtuel au physique, avec Ankama, Owlient et Shidonni.

    Ces 3 entreprises vendent des produits autres que leurs jeux en ligne, qui en sont dérivés. Leur approche est cependant différentes :
    - Owlient a créé des produits dérivés de son jeu sur le cheval (jeu de société, livre).
    - Shidonni fond le jeu et la création de peluches dans un même ensemble. Le jeu ne devient-il pas finalement juste un moyen de dessiner le personnage qu'on veut créer en vraie peluche ensuite ? En tout cas, l'effet est impressionnant, les peluches sont vraiment belles et la salle a applaudi quand sont apparues ces créatures physiques issues du virtuel et du monde de l'enfance.
    - Ankama a commencé par des produits dérivés de Dofus, mais a vite lancé une vraie stratégie cross-media très ambitieuse, créant des mangas, des magazines, une série télé, des DVD.... qui ont leur vie en dehors du jeu (et parfois aucun rapport avec leurs jeux). J'en profite pour vous conseiller l'excellent magazine IG Magazine qu'ils éditent sur les jeux vidéos (beaucoup d'interviews de créateurs de jeux, des rétrospectives et autres dossiers fouillés). Il existe aussi des synergies entre le jeu et le dessin animé : après chaque nouvel épisode passant à la télé, de nouveaux contenus apparaissent dans le jeu.

    Dans ce cadre, on multiplie les raisons qui font venir un visiteur sur le site : le jeu, les produits... et ce peut être des publics différents. Ainsi, Dofus a plutôt 80% de joueurs garçons, mais le rapport passe à moitié-moitié pour la vente de peluches, et le public est plus âgé pour les mangas. Les parents vont davantage venir voir les sites pour s'intéresser aux autres produits, aussi.
    Le passage au physique, en particulier sur des peluches, permet également d'introduire de l'émotion dans le rapport avec le site et la marque.
    Il faut bien sûr choisir les bons produits par rapport au public. Ne pas oublier de se préoccuper de la qualité des produits, car les acheteurs en ligne sont très exigeants (un magazine commandé en ligne doit être irréprochable alors qu'on peut acheter un exemplaire un peu corné chez son marchand de journaux sans crier au scandale), ainsi que des services associés (livraisons, retours).
    On peut aussi avoir de fausses bonnes idées. Owlient a édité un livre de guide de jeu qui a été mal reçu par la communauté des joueurs : veut-on les squizzer ? leur a-t'on piqué leurs idées ? à quoi sert le forum si les débutants ont un livre pour les guider ? etc.
  • Internationalisation avec Bigpoint, Innogames, et Owlient.
    - Il est important de s'appuyer sur des employés et/ou des bénévoles locaux dans chaque pays. Pour assurer d'excellentes traductions (très important) et animer les communautés (on revient au sujet du CM).
    - 4 critères majeurs pour choisir d'aller ou non sur un nouveau pays : le coût de localisation (traduction et adaptations culturelles), la taille du marché, le niveau de compétition avec d'autres jeux, et les soucis légaux.
    - Il faut mettre en place un marketing international, se préoccuper du cross-selling, et trouver des solutions de paiement les plus globales possibles. Ne pas hésiter à regarder ce que font les concurrents...
    - On peut aussi s'appuyer sur des partenaires pour tout ce qui est traduction, paiement, et animation de communautés.
    - Le traducteur doit traduire dans sa langue natale (classique), et être lui-même un joueur pour en avoir le vocabulaire spécifique !
    - La Chine est un marché très difficile, avec d'énormes droits de licences pour être présents dans les cyber-cafés, qui drainent la majorité des joueurs. Les compagnies locales sont nombreuses et parfaitement installées sur ces machines... De plus, il y a un vrai choc culturel. Par contre, voici un marché en plein boom : le Brésil. La Russie est un bon endroit pour se lancer aussi, ainsi que la Turquie, où les affaires fonctionnent bien et sont profitables. Des marchés sous-exploités pour le moment : les pays de l'est, et le moyen-orient. Cela vaut le coup de surmonter les quelques difficultés de localisation en arabe.
  • Financement avec le SNJV, Innovacom, eRepublik, Interactive Finance.
    - Le marché des investissements dans les jeux en ligne a démarré vers 2002, et a connu son pic en 2008. Le marché des jeux en ligne représente l'équivalent de 65% du marché des jeux vidéos classiques.
    - Un investisseur, c'est de l'argent, mais aussi des connexions, des opportunités... Il faut s'en sentir proche, être en phase avec son investisseur, car c'est une relation qui va durer quelques années !
    - Les investisseurs veulent du rêve, vendez-leur du rêve... sans vous déconnecter pour autant des réalités ! (grands débats là-dessus entre Nicolas Gaume ex-Kalisto et Benoît de Maulmin ex-Infogrames... qui nous ont un peu échappé).
    - Zynga a mis la barre très haut pour les jeux Facebook ! Du coup, les VC (Venture Capitalists) sont très exigeants sur les ambitions et les résultats de ce type de jeu, et ce n'est pas forcément très facile de s'y comparer.
    - Il existe pas mal d'aides diverses (crédits d'impôts et autres), mais gare à la multiplication des intervenants dans votre affaire, et aux contraintes en tous genres.
    - "Please customers, not investors !"
    - Le jeu en ligne est beaucoup  moins risqué financièrement que le jeu vidéo classique. Investissements moindres, développement rapide, et davantage de services que de produit, au final. Le retour sur investissement est assez rapide.
    - Les business angels sont plus faciles à séduire et à gérer que les VC. Les montants sont moindres, mais les coûts le sont aussi. Avec des VC, il vous faut un très bon avocat, et c'est très cher. Le temps passé à convaincre des VC est aussi considérable (compter 6 mois, au lieu de 2 pour des business angels), et un entrepreneur qui passe son temps avec les investisseurs est un entrepreneur qui délaisse sa boîte !
  • Protection de l'enfance avec Game in society, e-Enfance, et Ekoloko.
    - e-enfance a fait une présentation sur les problèmes liés aux jeux en ligne par rapport aux enfants de moins de 12 ans, qui en sont souvent une cible privilégiée. Par rapport aux jeux vidéos, le problème le plus spécifique est celui des paiements en ligne. Trop de jeux attirent les enfants avec des promesses de jeux gratuits sans limitation. Mais ensuite, la différence de jeu est conséquente entre ceux qui paient et ceux qui ne paient pas ! Du coup, on pousse les enfants à acheter, on les attire au maximum. Les cas d'emprunt de la carte bleue des parents sont "fréquents" mais cela reste difficile à mesurer ! aussi bien qu'à contrôler et à modérer, d'ailleurs.
    - L'idéal est de donner un tableau de suivi aux parents pour qu'ils aient connaissance de la durée de jeu de leur enfants, de leurs dépenses, voire aussi qu'ils puissent bloquer les fonctions de chat. Problème : quand cette option est proposée, très peu de parents l'utilisent ! (intervention du public de la part de l'équipe de MuzeWorld qui indique qu'un parent sur mille utilise ce type de fonctionnalité sur leur site dédié aux petites filles). Il faut donc éduquer les parents, dit e-enfance...
    - A titre d'exemple de fonctionnalités de protection des enfants, Ekoloko a parlé de son cas. Le chat public comprend un système de blackliste de mots interdits. Les adresses e-mail y sont également interdites à la saisie. Le chat privé n'est possible qu'en utilisant un système de phrases toutes faites. Les enfants peuvent se proposer pour être "ranger", càd pour être modérateur junior, sous l'aile d'un vrai modérateur.
    - On a deux types de monétisation : des avantages en jeu ou hors jeu. Le hors jeu, appelé "commodification", correspond à des fonctions d'amélioration du profil, ou de réseau social. Ces fonctions plaisent aux enfants sans créer de grosse ségrégation dans le jeu.
    - A noter qu'on a eu une petite altercation en direct entre Ankama et e-enfance. Cela a bien illustré la difficulté de communication entre les éditeurs et ce type d'association  (bien qu'Ankama précise qu'ils ont de bonnes relations avec Pedagojeux), et que ces sujets sont fort délicats... 
Voila qui a terminé la journée ! Au cours de l'après-midi, YeDo et moi avons pu retrouver de vieilles connaissances de TourdeJeu : Nonothehobbit et Wax, anciens de Ideo qui travaillent désormais tous deux chez 3Dduo, ou encore Jerem, ex de LaFédé (Heroville). Une journée qui valait vraiment le coup, et qui devrait se renouveler l'année prochaine... A suivre !